CHAPITRE 02 : Les promesses de l’Ombre

Elle n’était pas sûre de bien comprendre de quoi Bloody Cass était en train de parler. Bien sûr que le président Kimball s’était rendu sur le barrage Hoover pour galvaniser les troupes et montrer au sénat que c’était un homme de terrain… Mais la Légion… Comment comptait-elle tirer avantage de la situation ?

- Tout est affaire de propagande tu me disais…

- Affirmatif pouliche. Caesar, à l’inverse de la RNC était conscient de ses forces et de ses faiblesses. Il savait qu’il n’avait pas la puissance de feu pour lui, car entre l’infanterie lourde qui avait récupéré de vielles armures assistées de la Confrérie et les Rangers de la Baja, l’assaut frontal était exclu. En revanche, il savait que l’essentiel des troupes de la RNC était de simples conscrits… Des paysans et des fermiers enrôlés à l’arrache, disposant de quelques semaines d’entraînement avant d'être envoyés au front… Tu me vois venir ?

- Pas encore.

- C’est pourtant simple, Caesar voulait pousser les bleubites à la désertion, affaiblir durablement l’armée de la RNC... pour ensuite élargir le front au max. Et pour cela rien de tel que d’arranger un attentat contre le président et ce malgré toutes les sécurités déployées.

- Pourtant l’attentat a manqué…

- Parce qu’il n’a jamais été question de le buter ton président, incompétent comme il était, il était plus utile Caesar vivant que mort…

- Il va falloir développer davantage…

- Personne ne t’a appris à réfléchir dans ta carrière de rond-de-cuir ? Bref… Mort il devenait un martyr et il servait la propagande de la RNC, vivant, mais victime d’un attentat spectaculaire, où la peur pouvait se lire sur son visage et ce devant son armée, allait d’une part insuffler le doute et la peur dans les gros bataillons d’infanterie et galvaniser les légionnaires.

- Mais nous savons tous les deux que cela ne s’est pas passé comme ça… Alors est ce que vous pouvez m’expliquer ?

- En effet cela ne s’est pas passé exactement comme prévu… Car il y a eu l'intervention de Red Star…

- C’est-à-dire ?

- Nous avons été appelés par un de nos contacts, il nous a dit à l’époque qu’il pouvait y avoir un gros contrat de sécurité à décrocher auprès de la RNC. Ce qui m’a surpris c’est que c’est la patronne en personne qui a pris en main ce dossier.

- Votre patronne ?

- Ma patronne oui.

- Elle s’appelait…

- Vas te faire foutre…

- Je note.

- Très vite, elle a établis un canal de communication avec le major White – OUI, il s’appelait vraiment comme ça – il était responsable des opérations militaires de la RNC sur le barrage Hoover et ce faisant, c’est lui qui devait arranger le comité d’accueil pour le président. Autant te dire qu’il se chiait dessus, car à l’époque la Légion était juste en face de l’autre côté du Colorado. Et il savait aussi que la légion lançait des raids nocturnes sur la rive ouest, y compris sur le barrage lui-même. Alors ce Major s’est arrangé pour que l’on sache qu’il avait besoin de nous.

- OK, alors vous avez fait quoi ?

- Dans un premier temps nous avons fait une reconnaissance topographique du secteur, nous avions identifié tous les emplacements favorables pour un tir de précision – dans l’hypothèse d’un scénario d’assassinat par tireur d’élite. Ensuite nous avons inspecté tout son itinéraire et nous avons noté tous les emplacements propices à l’installation d’une bombe. Je me rappelle avoir passé des heures dans les conduits d’évacuation et tester divers scénarios d’empoisonnement. Et c’est là qu’il s’est passé un truc étrange… Le genre de truc qui façonne la légende de Red Star….

- Qu’est ce qu’elle a fait ?

- On était 4 : Red Star, Veronica, Raul, et moi. On avait chacun une mission attitrée. Et alors que je mesurais la distance entre les tours du barrage, ainsi que la force du vent, j’avais une vue complète sur le camp de la Légion… Une vue lointaine mais une vue quand même.

- Avec votre lunette de fusil ?

- Une lunette électronique de fusil gauss M72 oui. Je pouvais voir quand des légionnaires s’enculaient entre eux quand il n’y avait plus de femmes à tringler

Laura se sentait mal-à l’aise.

- Que veux tu ma petite c’est la légion… Garde à l’esprit que la plupart sont originaire de tribus primitives dans lesquelles mariage et viol sont synonymes… Putain de tribaux de merde.

- Ok… reprenons… Vous me disiez que vous voyez ce qui se passait dans le camp de la légion et qu’est-ce que vous y avez vu ?

- Red Star.

- Pardon ?

- Red Star en train de tailler une bavette avec Caesar… Ce qui était encore plus fou c’est qu’ils avaient l’air de se connaître depuis longtemps.

- Et c’est le cas ?

- Disons que c’est plus compliqué que ça…

- Très bien mais une question me vient… comment elle a pu entrer dans le camp de la Légion tranquillement comme ça ?

- Chaque chose en son temps. Le soir même, Red Star est de retour, j’en profite pour lui filer mon rapport. Là-dessus elle me sort « on se plante depuis le début, la RNC se plante depuis le début. »

- C’est-à-dire ?

- T’as pas de suite dans les idées toi… Les Huiles de la RNC étaient sûres que la Légion allait tenter de dessouder Kimball, mais non, simplement foutre la trouille aux hommes, et un peu de bordel dans les rangs en vue d’une attaque globale.

- Attendez… Vous ne seriez pas en train de me dire qu’elle est tout simplement allé demander au camp d’en face ce qu’il comptait faire ?

- Non bien sûr, mais tu sais dans le cadre d’une discussion courtoise et civilisée tu peux soutirer beaucoup d’informations... Cela, combiné aux multiples yeux et oreilles que possédait Red Star dans la Légion, elle a très vite deviné les plans de Caesar… Il n’y avait plus qu’à jouer notre partition.

- Ok, mais concrètement cela consistait en quoi ?

- Enfumer Caesar… lui faire croire que sa manipulation a fonctionné et en tirer un avantage tactique. Pour cela… le vrai-faux attentat DEVAIT avoir lieu.

- Vous… vous avez laissé faire ?

- Pas tout à fait… Red Star s’était procuré l’inventaire du dernier ravitaillement des troupes de la Légion, en dehors du matériel habituel, des vivres et des gonzesses, UNE ligne a attiré son regards, une simple caisse... Sur cette ligne il y avait écrit « Fléau de l’Est »

- Fléau de l’Est ? Qu’est-ce que c’était ?

- Un Fusil à rail magnétique de classe M250. Le grand frère de mon 72. Ces armes sont très rares, si bien qu'aujourd’hui on les baptise. Elles ont toutes été produites avant la guerre. Comme le M72, elle crache des EC de 2mm mais à une vitesse 4 fois plus élevée, si bien que même les armures les plus balaises de L’Enclave n’y résistent pas. Je me souviendrai toujours de l’expression quelle a eu en lisant cet inventaire de ravitaillement… Ce n’est que bien plus tard que j’ai vraiment compris que Red Star avait baisé tout le monde…

- C’est-à-dire ?

- Je l’ai su bien après mais il y avait bel et bien UN mec dans toute la légion qui pouvait accomplir un tir létal sur le président Kimball depuis l’une des tours du barrage. Qui c’était ?

- Achille… Ne me demande pas si c’est son vrais nom je n’en sais rien et pour tout te dire, je ne l’ai rencontré qu’une seule fois. Mais ce jour-là j’ai eu comme une impression… là aussi on aurait dit qu’ils se connaissaient depuis toujours.

- A vous entendre on dirait que Red Star pouvait aller et venir au sein de la Légion comme bon lui semblait… Pourquoi à votre avis ?

- Un conseil : ne t’approches pas du passé de Red Star… beaucoup sont morts pour bien moins que ça…

- J’en prends bonne note. Cet Achille au finale c’est lui qui va monter l’attaque contre le président ?

- Tout juste. Et il va faire un tir MA-GNI-FI-QUE. Est-ce que tu te souviens ce jour-là, en faisant son discours qu'il avait une posture étrange ? Il était légèrement en retrait par rapport à son pupitre…

- Oui c’est vrai, même que les journalistes ont proposé plein d’explications.

- Ben tu vas avoir un sacré scoop : sur le pupitre il y avait une cible électronique, qu’Achille devait détruire, cette dernière lui envoyait des données télémétriques pour ajuster son tir. Et Kimball est resté en retrait pour éviter d’être blessé lors de l’impact de la bastos….

- Ce qui veut dire que…

- Tout le monde était déjà au courant , y compris les soldats devant assister au discours et qu’à l’issue de ce vrai-faux attentat, nous avons inondé les canaux écoutés par la Légion de rapport de désertion… leur laissant croire que leur coup a réussi… qui plus est, Caesar a même pu entendre la détonation depuis son campement.

- Alors qu’en dehors des unités basés sur le Barrage, personne n’a rien su, en tout cas pas tout de suite. Et comme sur le barrage il n’y avait que des corps d’élite pour lesquels un secret d’état de plus ou de moins ne changeait rien au quotidien, nous avons pu tromper Caesar et fausser son jugement. Cela aura des putains de conséquences pour lui plus tard.

- Sa disparition ?

Pire, l’annihilation de régions entières par le feu nucléaire… Mais ça, c’est une autre histoire.

- Très bien. Je pense en avoir finis pour ce premier entretien.

- J’ai quand même une dernière question.

- Accouche.

- Pourquoi Red Star ? D’où vient ce nom ?

Pour toute réponse, Cass se leva et tira un collier comportant une capsule avec une étoile rouge luisante. Elle la tendit à Laura qui semblait perplexe.

- Alors c’est juste ça ? Une capsule de Nuka Cola, en édition limitée ?

- Une édition qui date d’avant la guerre... Va dehors, montre cela aux bonnes personnes et vois si ce n’est vraiment que « ça ».